L’école buissonnière

Quand on y pense… qu’il est loin désormais le temps où l’on franchissait le portail de l’école primaire en rêvant d’évasion printanière, de flâneries spontanées sous les saules, loin de la grande Histoire, de Maurice Carême et des divisions à virgules !

Et pourtant, hier matin, après avoir déposé Mini CEO à l’école, il s’est mis à flotter dans l’air comme un parfum d’interdit, une douce odeur d’oisiveté. Comme un air d’école buissonnière.

On se dit souvent : « si on ne le fait pas maintenant, on ne le fera jamais » ou : « à quoi ça sert sinon ? », « on devrait se l’autoriser, de temps en temps ». Mais la réalité, c’est que nous gardons toujours le nez dans le guidon et les orteils dans les contraintes. Oui, lâcher-prise n’est pas chose aisée. D’ailleurs,  la dernière fois que c’est arrivé, c’était il y a deux rentrées scolaires. Autant dire à l’ère du Crétacé !

Et puis, un matin, comme ça, on a comparé nos emplois du temps et décidé que c’était le moment. Le bon moment. Nos agendas, ces tyrans en papier pour moi et made in Google pour lui, n’affichaient aucune contrainte, aucune urgence, aucune chose « que si je la mets pas derrière moi, je vais me sentir stressé tout le reste de la semaine ». Alors on a opté pour une journée à deux.

Bon… Notez que la spontanéité était toute relative, hein ! Parce que nous sommes des adultes responsables, tout de même. La date a été bloquée une bonne semaine à l’avance, et nous avons croisé les doigts pour qu’il n’y ait pas d’imprévus ou d’aléas.

8 h 45, hier matin. Du café chaud, du silence, quelques regards complices, un début d’un programme improvisé. Enfin… presque. Parce qu’évidemment, même libres, on hésite : sport ou canapé ? Refaire le monde ou monter ce dernier meuble ? Rentabiliser ou profiter ? C’est qu’on a tellement l’habitude de faire, qu’on a oublié comment être…

D’ailleurs, dites-moi, l’école buissonnière, quand ce sont les adultes qui la font, ça s’appelle comment ? Un séminaire de légèreté ? Une déconnexion en pleine conscience ? Un atelier clandestin de liberté ? Une échappée belle en terre contrôlée ?

Qu’importe le nom, après tout. L’essentiel est ailleurs : savourer l’instant, s’accorder une pause volée au tumulte du quotidien, et profiter simplement du bonheur d’être ensemble rien qu’une journée, sans avoir à rendre de compte à qui que ce soit. Sauf peut-être à Mini CEO qui n’a pas manqué de relever l’incohérence ; ses deux parents ensemble matin et soir ? Louche… Bien sûr, il a posé des questions : « vous êtes restés ensemble toute la journée ? » ou bien encore : « vous êtes allés au restaurant ? » (summum de la trahison)

Alors, nous avons avoué. Nous avons fait l’école buissonnière. Nous nous sommes offert une évasion douce, une liberté joyeuse, une fugue sans valise

Maurice Carême aurait adoré.

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